Librairie Orange bleue

Pirates, Fabrice LOI

piratesCe livre retrace les errances de Tony, jeune gitan, forain de son état, musicien de jazz qui décide de quitter les siens et la loterie familiale pour rejoindre Marseille, ville-miroir qui attire les désespérés comme lui.

Il y survivra de petits boulots et de divers trafics dans le milieu interlope qui gangrène la cité phocéenne jusqu’à un épilogue tragique et sa rencontre fortuite avec Max, un ancien militaire devenu expert en balistique. Ce dernier va lui faire découvrir le monde des riches et surtout connaitre sa femme Awa, une diva soprano Sud-Africaine dont il va éperdument tomber amoureux .Il vivra cette passion jusqu’à son paroxysme et la rupture inévitable entre deux mondes qui se côtoient mais s’ignorent superbement.

Il va ensuite retrouver son ex-rival et mentor Max qui va l’impliquer dans une ultime aventure maritime au large de la corse, une enquête sur une sombre affaire de corruption mêlant les mafias internationales à propos de trafics de déchets en Afrique et plus particulièrement dans la corne orientale où sévissent les fameux pirates somaliens.

Les deux aventuriers y perdront la vie . Tony ; Robin des bois moderne va mourir dans une ultime tentative de vengeance pour prouver l’homme libre qu’il est.

Ce livre novateur et dérangeant est un patchwork littéraire où l’auteur livre ses obsessions (l’Afrique par exemple) et y assouvit ses passions comme la musique On y découvre la magie de certains lieux comme Marseille, ville faite d’attirance et de répulsion ou bien la chevauchée dans les déserts somaliens. Ce roman est aussi une réflexion approfondie et désabusée sur le monde actuel, l’exacerbation des égoïsmes, la réalité géopolitique et son cortège de souffrances ; en particulier les guerres larvées mais oubliées qui sévissent dans certaines contrées de l’Afrique et déciment les populations civiles depuis des lustres.

Ces propos ne peuvent laisser le lecteur indiffèrent malgré quelques imperfections de style et de visions parfois trop manichéennes.

Guy

 

Otages intimes, Jeanne Benameur

benameurEtienne est photographe, il parcourt les zones de guerre de par le monde .Un jour, alors qu’il mémorise avec son appareil une scène d’apocalypse, il est enlevé et retenu comme otage pendant de longs mois.

Le livre commence à sa libération qu’il vit dans une relative angoisse avec ses ravisseurs, puis son retour en France où il redécouvre la liberté. Il va progressivement réapprendre les gestes simples et les sensations de la vie.

Pour recouvrer cet apaisement et se reconstruire progressivement, il va se réfugier dans son village natal auprès des siens et dans ses souvenirs de jeunesse. Il y a sa mère Irène avec laquelle la relation est tellement forte que les mots sont inutiles, Enzo son ami d’enfance, taiseux qui parle mieux avec les mains qu’avec la bouche, Joffranda , fille de nulle part qui faisait aussi partie du trio de l’enfance et qui comme Etienne a choisi de témoigner sur les turpitudes du monde. Il y a aussi Emma, son amour impossible avec laquelle il n’a pu bâtir une véritable relation en raison de ses nombreuses absences physiques mais aussi morales.

Homme de chaos, il va petit à petit retrouver la sérénité dans un univers de silence, de couleurs, d’odeurs et de sons aux antipodes des souffrances humaines qu’il a traqué pendant des années .

Jeanne Benameur aborde dans son ouvrage une thématique résolument moderne, à savoir la part d’aliénation de chacun dans sa vie , voire de compromission avec les grandes injustices et la souffrance des peuples.

L’écriture fluide et poétique frôle par moment des considérations trop générales et manichéennes pour ce retour dans le monde des vivants.

Guy

 

Notre désir est sans remède, Mathieu Larnaudie

larnaudieL’auteur a divisé son ouvrage en sept tableaux qui relatent chacun un épisode de la vie mouvementée qu’a connue la starlette hollywoodienne Frances Farmer. On la découvre début des années 30 sur les plateaux de cinéma à l’aube d’une carrière prometteuse, puis on la retrouve quelques années auparavant comme adolescente dans la banlieue de Seattle où elle remporte un prix d’écriture avec un sujet iconoclaste, enfin à New York où elle monte sur les planches pour des spectacles d’avant-garde et fréquente des intellectuels de gauche , sensibles à la propagande prosoviétique. On la suit alors en voyage à Moscou. Les chapitres suivants décrivent la lente mais inexorable descente aux enfers de celle qui était promise à une carrière de star, l’arrestation en état d’ivresse, son procès puis son internement suite à ses frasques répétées, sa longue souffrance en milieu psychiatrique avant un retour éphémère à la fin des années cinquante sur le devant de la scène télévisuelle.

Mathieu Larnaudie s’est inspiré de faits réels pour dresser une biographie romancée de cette femme qui s’est d’abord révélé comme un corps pour dénoncer la dictature de l’image qui va émerger dans cette Amérique du début du vingtième siècle. Il dresse un réquisitoire sans concession des diktats imposés par l’industrie cinématographique, des abus psychiatriques commis au nom de la science et qui vont détruire son héroïne (sans jeux de mots) avant sa résurrection hypothétique.

Le style est amoureux de l ‘esthétique, voire de l’esthétisme, la phrase est plus baroque que jamais qui contraste avec la puissance du propos. Trop peut-être ?

Guy