Mary, Emily Barnett

mary

Un étrange roman, qui fait partie de ceux qui ne se racontent pas…

Deux narrations se déroulent en parallèle : la première dans le New York d’après guerre, narrant l’histoire psychologique, familiale et professionnelle de personnage(s) féminin(s) ; la seconde plonge le lecteur dans la pseudo-évolution psychanalytique d’une femme. Il est évident que ces deux narrations vont se rejoindre à un moment du roman, de façon attendue mais néanmoins surprenante, et agréablement surprenante, ce qui vient compenser les chapitres newyorkais peut-être longs… Un joli roman sombre.

Laurent Brodin

 

L’imposteur, Javier Cercas

Ce livre raconte l’incroyable imposture d’un vieil espagnol Enric Marco qui s’est réinventé une nouvelle vie à cinquante ans et qui a bluffé tout le monde pendant quarante ans en se faisant passer pour un héros des temps modernes.

Anti franquiste de la première heure et combattant de la guerre d’Espagne , figure emblématique et tutélaire du syndicalisme anarcho-libertaire , président d’une puissante confédération associative , président d’une amicale d’anciens déportés, Enric Marcos a revêtu tous ces costumes et a représenté Aux yeux du peuple espagnol ce courageux résistant ; témoin inlassable des crimes du passé qui a dit non à tous les outrages de l’histoire contemporaine alors qu’en réalité il ne fut qu’un simple citoyen vivant à l’instar de ses compatriotes une existence misérable sous la dictature franquiste.cercas

Don quichotte des temps modernes, il s’est bâti cette légende à partir de 1970 au moment où la dictature s’effondrait et les espagnols devenaient par nécessité amnésiques sur leur passé .Il a fallu attendre 2005 et le travail d’un discret historien madrilène pour que toutes ces impostures soient dévoilées et révélées au grand public à la veille d’une grande cérémonie.

Ce livre que Javier Cercas a mis longtemps à écrire (il en explique les raisons) est une réflexion profonde sur le rôle du mensonge dans le réel (la vie) et la fiction (la littérature) et aussi sur un certain nombre de mythes dont celui du héros, de la mémoire collective, de l’amnésie du peuple espagnol sur les tragédies qu’il a affronté.

L’auteur alterne les entretiens réels et imaginaires qu’il a eus en permanence pendant de nombreuses années avec l’imposteur et les grandes questions métaphysiques qui l’obsèdent en tant qu’humain et surtout écrivain. Il essaie de comprendre et de démonter les mécanismes qui ont conduit un être aussi insignifiant à devenir un homme nietzschéen.

Ce livre qui n’a pas laissé son auteur indemne est passionnant et très instructif. Il faut le lire .

Guy

 

Les bannis, Laurent Carpentier

bannisDans ce livre, Laurent Carpentier se raconte et dévoile ses origines .Il découvre les siens à travers plusieurs générations. Le roman de sa vie démarre de façon un peu laborieuse, chaotique avec un fait divers et on ne comprend pas bien dans les premières pages où l’auteur veut en venir d’autant que ce sujet (la famille) devient un thème littéraire très à la mode. Puis le texte se structure et on pénètre dans cette famille cosmopolite ; ils sont tous là, les figures emblématiques et tutélaires venues de partout et de nulle part, d’horizon sociaux disparates, de confessions différentes et de convictions fortes et ancrées. C’est un peuple de bannis une armée de l’ombre avec ses héros comme Jacques , le résistant fusillé par la Gestapo , Alice l’aïeule disparue dans les brumes de Sobibor mais aussi les vivants Henri , Arlette, grands-parents paternels bourgeois, médecins et communistes , Maurice le grand père volage et Fine la grand-mère paysanne centenaire qui l’a élevé sans oublier les parents Jeannot et Raymonde médecins et communistes eux aussi …..

Cette galerie de portraits donne l’occasion à l’auteur d’écrire quelques belles pages d’envolée lyrique et poétique où il s’interroge sur la métaphysique de la vie ; de la mort ; la famille corps cannibale qui vous poursuit toute votre vie durant. Cette errance généalogique lui a permis une véritable renaissance.

Cette genèse racontée comme une fiction se lit avec grand plaisir et on sera indulgent avec l’auteur pour les quelques inévitables répétitions car il s’agit de son premier roman.

Guy